Contrairement à nos ainés, tant les auteurs de ma génération que des générations futures, ne pourront se vanter d’avoir fait leurs débuts dans un magazine de bande dessinée. L’époque des (à suivre…), Pilote, Métal Hurlant… est bien révolue. Quand aux derniers mensuels qui forment le bastion d’un paysage de revues de papier consacrés au 9ème art, et distribués à grande échelle dans les kiosques, leurs ambitions artistiques est d’autant plus fébriles que leurs avenirs comme journaux imprimés.
D’un côté c’est excitant, car cela force à trouver de nouveaux débouchés, d’un autre c’est d’autant plus inquiétant, car travailler hors structure d’une revue nous isoles d’avantage sur des échanges artistiques humains. Le web a ce paradoxe d’étendre nos contacts sur l’ensemble du globe, tout en conjuguant ces échanges entre quatre murs, rendant nos interlocuteurs invisibles au delà de l’écran d’un ordinateur. Facebook est d’ailleurs l’endroit virtuel où la solitude me semble omniprésente. Bien sûr il y a les blogs et ces nombreux sites web de prépublications pour exhiber le talent de chacun. Mais pour moi il y a rien à faire, même si j’accepte de vivre avec mon temps, je n’arrive pas à me passer de l’aspect charnel d’un livre lorsque me vient l’envie de lecture.
Evidement, quand je suis tombé sur « la Crypte Tonique » et son magazine, j’avais envie de me jeter à corps perdu dans l’aventure pour ressentir ne serait-ce que le quart de folies créatrices d’un Schuiten, d’un Moebius, d’un Crumb, d’un Tardi et qui sais-je encore, pouvaient avoir dans ce type de publication (Ces comparaisons sont toutes proportions gardées bien entendu). De pouvoir côtoyer un laboratoire sans rougir de nos productions tout en se disant que l’on aura une nouvelle opportunité dans le prochain numéro, et qui serait fédérateur d’un sillon tracé dans notre évolution si bien professionnelle que personnelle…Un mode de penser, qui semble totalement conceptuel aujourd’hui.
Qu’est-ce que la Crypte Tonique ?
« Le projet est né des contacts entre Philippe Capart et Michel Deligne du « Deuxième Souffle » anciennement « Curiosity House ». Deligne, père et fils, gardent, depuis 1971, « le Temple de la bande dessinée », aujourd’hui au 33 rue Van Bergen à Koekelberg. Imaginez le temple hindou le plus baroque, retournez le comme un gant, et vous avez une idée de l’antre des Deligne. Dans les années 70 et 80, ce magasin était un des hauts lieux de culture à Bruxelles. Il proposait un biotope de la création populaire en images allant bien au delà des hiérarchies spéculatives.
En 2011, dans des circonstances relatées en détails dans le magazine N°0, Philippe Capart a racheté une petite partie de leur formidable stock. L’idée est de ramener à la surface ce formidable magma mythologique et de le proposer à ses contemporains par la création d’une plate-forme où les créations anciennes jouxtent les créations contemporaines, où les morts côtoient les vivants. Avec la Crypte Tonique, le magasin comme le magazine attaché, deviennent des lieux d’échanges entre biens matériels et immatériels. Un lieu où les mythologies anciennes peuvent être confrontées aux mythologies actuelles, où le sacré côtoie le profane.
Le nom « La Crypte Tonique » est un jeu de mot reposant sur « Kryptonite ». Un minéral extrait de la planète Krypton, planète d’origine de Superman. Mais contrairement à la « Kryptonite », ce morceau de passé, véritable talon d’Achille, qui fait perdre tout ses moyens à notre super-héros new-yorkais, la « Crypte Tonique » pose l’hypothèse que le passé peut être un puissant régénérateur pour le présent. »
N°4 « SAUVAGE COMME UNE IMAGE »
Ma petite participation se résume à 7 strips de bande dessinée noir et blanc fait au Rotring. Une première pour moi tant sur le format que sur la technique. La contrainte (si cela en était une) est d’avoir calqué mon histoire sur le thème de ce numéro: « (…) Nombreuses des images dans ce numéro sont issues de Blancs n’ayant eu que très peu, voire aucun contacts directs, avec les sujets représentés: les Noirs. Ces images sont alors des mines d’informations sur les idées reçues et les images véhiculées au sein de l’environnement de leurs auteurs. La Crypte Tonique propose ici un portrait de Blancs par leurs images du Noir. En exposant, on s’expose. En préjugeant on se condamne. C’est le principe de l’arroseur arrosé. »
Si vous êtes de passage à Bruxelles, visitez la crypte et achetez son magazine ou l’un de ses trésors. Pour ceux qui sont trop loin, je pense que son hôte pourra répondre à tous ceux qui ont soif de questions.
La Crypte Tonique
Philippe Capart
Galerie Bortier, 16
B-1000 Bruxelles
+ 32 (0)2 514 14 92
J’adore ton blog, bonne continuation!
bon article très pertinent !